RÉFÉRENDUM DU 20 MARS : Pourquoi voter OUI ?
SOURCE: http://www.dakaractu.com/REFERENDUM-DU-20-MARS-Pourquoi-voter-OUI_a107753.html
Le Pds et
ses acolytes, les jeunes vieux et leurs lourds fardeaux, quelques
"droitsdelhommistes" ombrageux et d'anciens "quelquechose"
passablement nerveux, des maîtres chanteurs et des chroniqueurs du facebook Ã
la prose pathétique : l'alliance groupusculaire du Non ne dira jamais contre
quoi appelle-t-elle à voter.
La mauvaise foi, le simulacre et cette maladie honteuse en politique qu'on
appelle le pouvoirisme sont devenus les choses les mieux partagées au sein de
cette curieuse galaxie qui a une peur bleue du OUI. Peur panique, devrais-je
dire, peur de la vérité, peur des faits, peur du débat de fond. Peur
d'affronter la question essentielle: contre quoi appelle-t-elle à voter?
Voilà pourquoi, toute leur stratégie est basée sur le postulat totalement faux
et la croyance naïve que les Sénégalais sont immatures, incapables de
discernement et de bon sens. Les voilà qui brandissent l'arme de la
désinformation et de l'intoxication.
"Si vous votez OUI, vous voter pour la légalisation de
l'homosexualité", disent les tenants en désarroi du non.
L'irresponsabilité et l'indécence le disputent à la contrevérité. Et chacun
d'entre eux prétend diriger ce pays un jour. Mais surtout, ils osent parler
d'éthique. A défaut d'argument, ils versent dans l'excès, la démesure et le
mensonge: c'est leur subconscient qui parle, les poussées délirantes mettant Ã
la lumière du jour des tendances profondes, y compris l'homosexualité! Etonnant
d'ailleurs que des droitsdelhommistes bavards et sans mémoire, pour des raisons
politiciennes et dans un élan revanchard, se mêlent à ce concert inepte du faux
et de la mauvaise foi.
Macky Sall a été on ne peut plus clair devant le Président Obama, devant des
eurodéputés et en d'autres circonstances: tant qu'il est à la tête de l'Etat,
l'homosexualité ne sera pas légalisée au Sénégal. Mieux, ni explicitement, ni
implicitement, le projet de révision de la Constitution ne fait référence de
quelque manière que ce soit à l'homosexualité.
Alors, d'où ont-ils puisé le thème de l'homosexualité sinon de leur profond
désir refoulé? Ils disent que l'expression "nouveaux droits" est
suspecte. Quelle légèreté! Le point 4 du projet de révision de la Constitution
est ainsi libellé: "la reconnaissance de nouveaux droits aux citoyens: droit
à un environnement sain, sur leurs ressources naturelles et leur patrimoine
foncier".
Où est l'homosexualité ou un seul soupçon d'indice de risque de légalisation de
l'homosexualité dans cette notion de nouveaux droits? Oh les faux dévots
incapables de contrôler leurs pulsions!
Mieux, l'article 25 du projet, alinéas 1 et 2, mentionnent très clairement ce
qui suit et que je reproduis entièrement pour davantage de clarté: "Les
ressources naturelles appartiennent au peuple. Elles sont utilisées pour
l'amélioration de ses conditions de vie. L'exploitation et la gestion des
ressources naturelles doivent se faire dans la transparence et de façon Ã
générer une croissance économique, à promouvoir le bien-être de la population
en général et à être écologiquement durables. L'Etat et les collectivités
territoriales ont l'obligation de veiller à la préservation du patrimoine
foncier".
Et pour l'environnement, l'article indique: "La défense, la préservation
et l'amélioration de l'environnement incombent aux pouvoirs publics. Les
pouvoirs publics ont l'obligation de préserver, de restaurer les processus
écologiques essentiels, de pourvoir à la gestion responsable des espèces et des
écosystèmes; de préserver la diversité et l'intégrité du patrimoine génétique,
d'exiger l'évaluation environnementale pour les plans, projets et programmes de
promouvoir l'éducation environnementale et d'assurer la protection des
populations dans l'élaboration et la mise en oeuvre des projets et programmes
dont les impacts sociaux et environnementaux sont significatifs".
Où est-il question d'homosexualité dans cet article que nous avons reproduit
intégralement?
Autre contrevérité: "voter OUI, c'est voter pour la suppression du second
tour". La mauvaise foi est étalée dans tout son éclat et renseigne sur
l'image de l'alliance groupusculaire. Article 26 du projet de révision de la
Constitution soumis au référendum: "Le Président de la République est élu
au suffrage universel direct et à la majorité absolue des suffrages
exprimés"! (C'est nous qui soulignons). Mieux, l'article 33 de la
Constitution dispose: " Le scrutin a lieu un dimanche. Toutefois, pour les
membres des corps militaires et paramilitaires, le vote peut se dérouler sur un
ou plusieurs jours fixés par décret. Nul n'est élu au premier tour s'il n'a
obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés. Si aucun candidat n'a obtenu
la majorité requise, il est procédé à un second tour de scrutin le troisième
dimanche qui suit la décision du Conseil constitutionnel. Sont admis à se
présenter à ce second tour, les deux candidats arrivés en tête au premier tour
(...). Au second tour, la majorité relative suffit pour être élu". VoilÃ
qui est d'une clarté aveuglante. Ayant peur de la vérité, l'alliance
groupusculaire persistera dans la contrevérité, feignant d'oublier que l'écrit
jamais ne ment.
Il faut bien s'accrocher avant de tomber de sa chaise lorsqu'on entend pérorer
des leaders bien en vue sur "l'intention de Macky Sall de briguer un
troisième mandat si le oui passe". Oui, s'accrocher, car là on peut douter
à juste raison de leur sérieux. L'article 27 du projet de révision de la
Constitution: "Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs"!
La durée du mandat importe peu: c'est le nombre qui est, ici, bien encadré. Le
Président Macky Sall le sait parfaitement. Ce sont les pouvoiristes à la cécité
avérée qui versent dans l'intoxication et la mauvaise foi.
Leur stock de désinformation épuisé, ils anticipent sur leur défaite en
distillant des rumeurs de "fraude et de bourrage des urnes" ou encore
d'"achat de conscience". La rengaine! Notre réponse est claire: si la
fraude était possible, le régime ancien n'aurait jamais été défait. N'a-t-il
pas d'ailleurs utilisé l'arme de l'argent jusqu'au dégoût, proclamant urbi orbi
que chaque Sénégalais a un coût?
Nous invitons l'alliance groupusculaire au débat de fond, au respect scrupuleux
des règles du jeu. Nous les invitons à quitter le terrain de la désinformation,
de l'intoxication et de la mauvaise foi. Juste que nus doutons de leur capacité
à s'élever au-delà de leur nébuleuse tendance pouvoiriste!
Position du problème
Le 1er mars 2012. Le candidat Macky Sall, alors au deuxième tour face au
Président sortant, sort d'une rencontre importante avec les leaders de ce qui
allait être la coalition Benno Bokk Yaakar qui le soutient. Un nombre
impressionnant de journalistes, de la presse nationale et internationale,
l'attend pour sa première conférence de presse après un premier tour qui l'a
mené dans tous le pays. Entre autres sujets abordés, il fait une annonce qui
détonne. Il confirme, en effet, l'option, contenue dans son programme Yoonu
Yokkute, du retour au quinquennat que son prédécesseur avait fait supprimer par
l'Assemblée nationale. Mieux, il s'engage sur sa volonté de s'appliquer le
principe de la réduction de la durée du mandat du Président de la République
s'il est élu par les Sénégalais.
A ceux qui lui sont proches, militants, amis et parents qui l'interpellent, il
indique clairement qu'en dix ans, il est possible de contribuer efficacement et
de façon décisive au développement du Sénégal et au bien-être des populations
sénégalaises. Après tout, le destin du Sénégal est une construction
ininterrompue, engageant une succession de générations et de leaders. Nul n'est
indispensable, encore moins irremplaçable. Il savait alors, d'un savoir vécu et
irréfutable, que la question n'est pas dans la longévité au pouvoir. La grande
question, celle qui mérite tous les enjeux, est celle du leadership apte Ã
transformer la donne pour un véritable développement, durable et inclusif. La
grande question est celle de l'efficacité, celle de la capacité à travailler
vite et bien pour l'intérêt supérieur du pays. Versant politique !
Non moins important, voire capital, est le versant éthique : l'éthique du
comportement dans l'épreuve et l'exercice du pouvoir. Quelle est votre ambition
en décidant d'aller à la conquête du pouvoir ? Cette question est plus que
grave. Elle est au cœur de la psychologie de ceux qui, ayant une nette
conscience des rigueurs et des raideurs du pouvoir, s'engagent physiquement,
intellectuellement, moralement et matériellement pour sa conquête. Toute
l'histoire de l'humanité est traversée par cette question qui a produit,
invariablement, deux réponses en termes de profils de leaders. Le pire et le
meilleur.
Le pouvoriste considère le pouvoir comme une fin en soi. C'est l'ivresse du
parvenu. Au sommet de la gloire, il n'a plus que le regard tourné vers sa
propre personne, tout entier sommé par son propre désir de jouir sans mesure.
L'autre dirait, irresponsabilité assumée, qu'avec le pouvoir, « nos soucis
financiers sont terminés ». Parce que le pouvoir, c'est l'argent, la puissance,
la surpuissance. Les romans, les contes, les légendes, le théâtre et l'histoire
réelle sont infestés par la figure du « roi fou » : humeurs, culte de la
personnalité, orgies et brutalité. Injustice et iniquité.
C'est aux antipodes de cette figure, en république, en démocratie et en Etat de
droit, que s'identifie le profil du leadership entièrement voué à la cause du
pays pour sa grandeur et du peuple pour son bien-être. Le temps du pouvoir est
corrupteur. C'est pourquoi il faut le limiter. Rigoureusement. Il faut
dissoudre le risque de mauvais comportements dans l'acide des bornes raisonnables
quant à la durée d'un mandat mais aussi quant au nombre de mandat. Sans
limites, le temps du pouvoir génère des « monstres froids » à l'ivresse
dionysiaque. Mais dans les limites raisonnables fixées, il est possible de
servir son pays et son peuple avec toute la générosité et la rigueur requises.
Une telle psychologie met le pouvoir à distance. Comme je le rappelle dans
l'ultime partie de ce petit livre, comme le rappelle Alioune Fall dans son beau
livre Contre ventes et marées, le Président Macky a vécu l'expérience, toute
récente, de la démission de ses positions au pouvoir : son mandat de député et
de conseiller municipal de la ville de Fatick dont il était le maire.
Macky Sall s'engage donc pour la limitation et de la durée et du nombre
de mandats du président de la République. Pour lui, il faut verrouiller ces
dispositions dans la Constitution. Sa victoire, entre les deux tours de la
présidentielle de 2012, était quasi-certaine. Son engagement n'était ainsi ni
électoraliste, ni démagogique encore moins populiste. Il tenait de l'engagement
axiomatique, au nom de toute une génération de Sénégalaises et de Sénégalais
soucieux du devenir de leur pays dans la stabilité, la paix, la liberté, la
démocratie et la prospérité. Qui, par ailleurs, plus que le Président Sall, a
su articuler à un niveau de performance aussi élevé l'exigence de lutte contre
les inégalités et les injustices, d'une part, et cette passion pour la
République et la bonne gouvernance d'autre part ? Il s'agit, avant tout, de
faire de cette articulation l'enjeu et le cœur du pouvoir. Loin des approches
jouissives.
Référence incontestée en matière de démocratie dans le monde, le Sénégal ne
saurait plus s'accommoder de situation d'instabilité de sa charte fondamentale
en fonction des contingences et des intérêts particuliers. Il ne doit plus être
question que l'expression du suffrage du peuple, souverain, s'exercer de
manière aussi sporadique. Une telle errance fait croître et se cristalliser, du
fait des enjeux du pouvoir mais aussi des effets pervers de l'usure dans
l'exercice de celui ci, les germes de l'instabilité. Le 23 juin est
dictionnaire toujours actuel de tous les termes de cette vérité.
Le Sénégal a pu, jusqu'ici, échapper aux heurts politiques violents qui
caractérisent, hélas, la vie politique dans beaucoup de pays africains. Cette
marque d'identité nous vaut à nitre pays d'être salué comme un îlot de
stabilité dans un contexte où les tripatouillages constitutionnels font le lit
d'innombrables crises ponctuées, malheureusement, par la mort de centaines
voire de milliers de citoyens. Désastre incommensurable.
C'est donc, instruit par l'histoire et non pas seulement par les principes, en
toute responsabilité et conviction que devenu Président de la République, Macky
sall réaffirme sa volonté de réviser la Constitution pour, entre autres,
ramener la durée du mandat du Président de la République de sept à cinq ans et
stabiliser définitivement le nombre de mandats consécutifs à deux. Il a la
pleine conscience que la tendance des démocraties modernes, dont se réclame le
Sénégal, est de se doter d'un système politique stable mais dynamique qui
répond à des besoins d'efficacité et d'efficience dans la gestion de la chose
publique.
Premier indice de bonne volonté, la Commission nationale de réforme des
institutions est créée par décret N°2013-730 du 28 mai 2013. Amadou Macktar
Mbow, figure emblématique des Assises nationales, est nommé président. Une
large concertation est lancée, impliquant tous les partis politiques et toutes
les couches de la population. Le 13 février 2014, la CNRI dépose son Rapport.
Le Président de la République s'engage à l'examiner attentivement pour s'en
inspirer dans son projet de révision de la Constitution dont l'enjeu majeur est
de consolider notre démocratie, renforcer l'Etat de droit grâce à des
institutions revigorées. L 31 décembre 2015, à l'occasion de son message de
nouvel an, le Chef de l'Etat énumère les quinze (15) points de la révision de
la Constitution, dont la durée et le nombre de mandats du Président de la
République, mais aussi l'application du quinquennat au mandat en cours. Et 13
des quinze points sont des propositions tirées du Rapport de la CNRI! Qui peut
soutenir, ainsi, un seul instant, qu'il n'y a pas eu de concertation?
Les tenants du Non n'ont jamais voulu aborder la révision dans son ensemble, la
réduisant au seul point portant sur l'application de la réduction de la durée
du mandat au mandat en cours. Oui, l'essence du pouvoirisme est de considérer
le pouvoir comme une fin en soi, et c'est pourquoi c'est une tendance politique
mortifère, donc très dangereuse, d'autant plus dangereuse qu'elle peut se
nourrir d'un esprit grégaire de revanche. Contre le pouvoirisme, il convient de
donner aux quinze points un autre espace d'expression et de visibilité.
1. la modernisation du rôle des partis politiques dans le système démocratique
;
2. la participation des candidats indépendants à tous les types d'élection;
3. promotion de la gouvernance locale et du développement territorial par la création
du Haut Conseil des collectivités territoriales ;
4. la reconnaissance de nouveaux droits aux citoyens : droits à un
environnement sain, sur leurs ressources naturelles et leur patrimoine foncier;
5. le renforcement de la citoyenneté par la consécration de devoirs du citoyen
;
6. la restauration du quinquennat pour le mandat présidentiel ;
7. le renforcement des droits de l'opposition et de son Chef ;
8. la représentation des Sénégalais de l'extérieur par des députés à eux dédiés
;
9. l'élargissement des pouvoirs de l'Assemblée nationale en matière de contrôle
de l'action gouvernementale et d'évaluation des politiques publiques ;
10. la soumission au Conseil constitutionnel des lois organiques pour contrôle
de constitutionnalité avant leur promulgation ;
11. l'augmentation du nombre des membres du Conseil constitutionnel de 5 Ã 7 ;
12. la désignation par le Président de l'Assemblée nationale de 2 des 7 membres
du Conseil constitutionnel ;
13. l'élargissement des compétences du Conseil constitutionnel pour donner des
avis et connaître des exceptions d'inconstitutionnalité soulevées devant la
Cour d'Appel ;
14. la institutionnalisation des principes de la décentralisation et de la
déconcentration ;
15. l'intangibilité des dispositions relatives au mode d'élection, à la durée
et au nombre de mandats consécutifs du Président de la République.
Le Président de la République choisit la voie référendaire pour soumettre le
projet de révision de la Constitution au peuple. Pas par coquetterie, mais par
pédagogie et par anticipation aux objections d'adversaires qui, si le projet
était allé directement à l'Assemblée nationale, auraient crié au complot de la
majorité parlementaire d'autant plus que le fond du projet ne les intéresse
guère.
Le 16 janvier 2016, le Chef de Etat saisit le Président de l'Assemblée
nationale et Conseil Constitutionnel comme l'y oblige la loi pour recueillir
leur avis en vue de proposer au peuple sénégalais, souverain, un nouvel
ensemble de textes portant révision de la Constitution.
Dans l'ensemble, le Conseil Constitutionnel lui reconnaît la légalité de
l'exercice référendaire qui ne présente pas d'inconstitutionnalité sauf sur un
point : la disposition transitoire (Article 27 nouveau, alinéa 2) par laquelle
le président de la République en exercice souhaite se faire appliquer la
réduction du mandat à 5 ans, si les Sénégalais en décidaient ainsi.
Le 16 février 2016, dans une adresse à la Nation, le Président de la
République, gardien de la constitution, restitue la décision numéro 1/C/2016
rendue par le Conseil Constitutionnel en son audience du 12 février 2016. Le
Conseil constitutionnel déclare que l'application du principe de réduction de
la durée au mandat en cours n'est pas conforme à la Constitution.
Le mandat en cours est frappé du sceau de l'intangibilité et échappe à toute
tentative de lui appliquer une rétroactivité. En clair, le Conseil
Constitutionnel décide que le Président de la République du Sénégal peut
soumettre son projet au referendum, toutefois sans la clause de l'application
immédiate de la réduction de la durée au mandat en cours.
Le Président de la République annonce à son peuple qu'il se conforme à la
décision du Conseil constitutionnel. Contre la tentation populiste de défiance
à l'institution qui conduit, d'une lanière ou d'une autre, à l'aventure
déstabilisatrice. Son statut de Chef d'Etat, de surcroit dans un pays dont la
Constitution et les institutions ont été mises à rude épreuve dans une période
récente, l'adjoint de respecter les décisions (ou avis, peut importe) de
l'organe chargé, par excellence, de dire la loi. Qu'elle soit bonne ou
mauvaise, la loi, c'est la loi, et nul ne doit, sauf cas extrême de flagrante
injustice et illégalité, défier le juge à qui a été confiée, expressément, la
mission d'interpréter la constitution et de veiller sur la constitutionnalité
des procédures et actes dans la gouvernance, de façon générale.
Le choix de la légalité, le choix du respect du Conseil constitutionnel seront
l'occasion d'une levée de boucliers dans l'espace politico-médiatique. Certains
acteurs contestent, hélas, cette option républicaine du président de la
République se conformer à la recommandation du Conseil constitutionnel.
Deux postures s'affichent alors. La première est d'inspiration
universitaire, mettant en scène des spécialistes, des enseignants et des
chercheurs en droit. La deuxième peut être dite d'inspiration éthique. L'une et
l'autre présentent des faiblesses évidentes à mon ais. Et je vais dire
immédiatement pourquoi.
Les tenants de la posture "universitaire" soutiennent que le Conseil
constitutionnel a rendu un avis qui est plutôt consultatif, non contraignant.
L'écrit diffère de la conversation. Dans le cas d'espère, le Conseil
constitutionnel mentionne clairement qu'il a rendu une décision. (Voir décision
du CC). C'est de l'extérieur, c'est-à -dire de l'espace universitaire, que les
tenants de cette posture parlent d'avis. Lorsque le lexique est en jeu, il est
tout de même important de tenir compte de celui des uns et des autres.
Autrement, on opère une critique externe. C'est juste une question de logique
formelle. Le Conseil constitutionnel ne peut être pris à défaut que lorsqu'il
tire de son propre postulat des conclusions non conformes. Or, voilà que le
Conseil constitutionnel parle de décision et que, de l'extérieur on lui dit, «
non, tu dois parler ou, en vérité tu parles d'avis »...
Ensuite, le Conseil constitutionnel dit bien que la disposition en question est
contraire à l'esprit et à la lettre de la constitution. En termes clairs,
l'application du principe de réduction de la durée du mandat en cours est
inconstitutionnelle.
Il est rare que les universitaires s'impliquent dans une controverse de cette
nature et de cette manière car, s'ils peuvent et doivent s'impliquer dans les
grands enjeux de leur société, il est tout aussi clair que ce ne sont pas eux
qui sont chargés de dire la loi en la matière. Il y a bien une institution qui
y est dédiée. En revanche, ils peuvent et doivent, en tant que chercheurs et enseignants,
contribuer à enrichir la doctrine, à partir d'une démarche qui se méfie de
l'instantanéité et dans des supports appropriés à la divulgation du travail
scientifique.
Ensuite, avis ou décision, pour nous autres profanes, tout de même profanes
républicains et démocrates soucieux de l'Etat de droit, le PR est fondé Ã
suivre le Conseil constitutionnel, institution, par excellence, chargée
d'interpréter la constitution et de veiller à la constitutionnalité des lois.
Soutenons que c'est un avis, mais un avis d'une institution qui dit au
Président de la République : « Monsieur le Président, ce que vous voulez faire
est contraire à la Constitution et doit être retiré du texte ». Le tenant de la
posture d'inspiration universitaire dit au Président : « ce n'est qu'un avis,
certes un avis qui déclare l'inconstitutionnalité de ce que vous voulez faire,
mais vous devez passer outre et faire ce que vous avez envie de faire ».
Jusqu'où peut mener une telle logique ?
Si le Président de la République lui-même traite les institutions de manière
désinvolte, n'en faisant qu'à ses humeurs, il les affaiblit fatalement alors
qu'il doit en être le protecteur fidèle, la sentinelle imperturbable en tant
que Président de la République. Même si le Conseil constitutionnel lui disait
explicitement et expressément qu'il peut suivre ou non son avis ou sa décision,
le Président de la République est tenu de se conformer au nom de l'impératif de
respecter la constitution et l'institution chargée de son interprétation.
Les recommandations pertinentes sont faites pour être appliquées. Justement,
l'éthique républicaine, c'est d'abord le respect de la légalité républicaine,
le respect des institutions qu'il faut consolide et renforcer pour assurer
l'impersonnalité des processus de prise de décision.
Les tenants de la posture d'inspiration éthique soutiennent que le Président de
la République n'a pas respecté « son engagement ». Or, l'éthique le contraint Ã
s'appliquer le principe de réduction du mandat en cours malgré et contre la
décision ou l'avis du Conseil constitutionnel.
Je réponds à cette compulsion dogmato-éthique avant de dire ses conséquences
désastreuses. En Afrique de l'Ouest, la parole est sacrée. Nous sommes une
civilisation de tradition orale. Nous connaissons tous la valeur et la
puissance de la parole dans cette ère culturelle. La raison orale puise sa
consistance dans la mémoire qui est vivante parce qu'elle est le siège de la
règle fondamentale qui cimente notre communauté et régit nos rapports. Nous savons
tous, par logique et par expérience, que la parole donnée est loin d'être un
dogme. Nos anciens n'ont jamais considéré que la parole était supérieure à la
charte qui fonde notre communauté de destin. L'obstacle à la parole donnée
relève, pour l'homme d'honneur, du réel de l'intérêt général et de l'esprit de
la règle convenue. C'est le côté de l'histoire, notre histoire dans son
exemplarité.
Du côté de ce qui nous importe aujourd'hui, notre ligne argumentaire est nette.
D'abord, Macky Sall a respecté sa parole, celle d'inscrire dans notre
constitution la limitation de la durée et du nombre de mandats du Président de
la république. Ensuite, la quête de l'idéal héroïque, attitude de défiance
contre l'avis ou décision du Constitutionnel peut-elle primer sur la légalité
républicaine? Non, l'éthique républicaine, c'est d'abord et encore le respect
de la légalité républicaine, le respect institutions chargées de réguler notre
système démocratique et de veiller à l'équilibre des pouvoirs, sans quoi nous
sommes, en permanence, sous le risque de l'instabilité et du conflit.
La faiblesse de l'argumentaire des deux postures est évidente. L'une et l'autre
ont en commun le secret souhait, à moins qu'il relève du subconscient, est de
voir le Président de la République du Sénégal défier héroïquement le juge
constitutionnel au nom de l'idéal héroïque. Oui, on peut faire l'histoire comme
on peut. Se retirer dans le château des principes, héros soustrait au réel et Ã
la complexité de l'action qui l'affronte. Je témoigne tout de même mon amitié
indéfectible à plusieurs de ceux qui sont dans la logique du non au référendum.
Entre amis, il ne saurait y avoir de transfert négatif pour de basses raisons.
Il y a la contradiction dans les manières de voir et de résoudre les équations
de l'histoire. Je pense, pour ma part, qu'ils sont dans une dialectique très
difficilement soutenable, parce que vouée à l'impasse. C'est de logique qu'il
s'agit : entre un postulat et ses inférences, la cohérence est un pré requit.
Vous ne pouvez pas demander à celui qui a la charge de veiller au respect de la
Constitution, et de la loi en général, de violer celles-ci, quelle qu'en soit
la raison.
Je défends : l'idéal héroïque, qui n'est pas forcément consubstantiel à la
vérité et à l'idéal de justice, ne saurait primer sur l'impératif
républicain. Un ami de mes relations pense, et il est de bonne foi, que le
Président de la République serait définitivement rentré dans l'histoire en
faisant fi de l'avis (ou décision du Conseil constitutionnel. Voici ma réponse
: « On peut entrer définitivement dans l'histoire de diverses manières. En
violant la loi ou en la respectant malgré la clameur et l'humeur du moment ».
Le second terme du choix, assumé par le Président de la République, découle
doublement d'une éthique du courage et d'une logique de conviction. Il
affronte, en effet, des affects, des dogmes et des pétitions de principe, des
enjeux et des agendas qu'il est impératif de d'éclairer pour mieux saisir le
débat.
L'alliance groupusculaire du non est composée de deux tendances unies par leur
soif obsessionnelle du pouvoir et une cristallisation crypto-personnelle peu
commune dans notre histoire politique.
Les uns, incapables de lire l'histoire, croient pouvoir la répéter: ils pensent
que Macky Sall doit tout juste incarner la figure du Président de transition.
Oui, les Assises nationales ont constitué une séquence capitale dans notre
trajectoire démocratique. Toutefois, la question du Président de transition n'a
pas trouvé de solution. Il est donc étonnant que certains, en rupture, et
profondément atteints par leur défaite, prennent prétexte de ce référendum
comme pour prendre une revanche sur l'histoire.
Les autres, ayant toujours cru en la toute puissance de président sortant,
ruminent encore leur défaite, le couteau à la bouche, entonnant l'air déjÃ
entendu et d'essence anti-démocratique de "l'erreur du peuple
sénégalais" d'avoir élu le candidat Macky Sall. Voilà d'ailleurs pourquoi,
depuis 2012, ils n'ont pas cessé de monter toutes sortes de stratégies pour
"renverser" (l'ancien Président et Secrétaire général du Pds) le
Président élu. Ne méritent-ils pas alors d'être identifiés comme des
revanchards et putschistes?
Ainsi, l'alliance groupusculaire est, en réalité, extérieure au référendum comme
mode d'expression démocratique. Ils sont dans des schémas à la fois
antirépublicains et antidémocratiques. Leur défaite doit alors être encore
beaucoup plus accentuée.
En refusant de céder à leur médiocre campagne de contrevérité et de mauvaise
foi, le peuple sénégalais indique bien que le 20 mars, les pendules seront
remises à l'heure. Alors, chacun devra en tirer toutes les conséquences en
revisitant ses prétentions
Dakaractu
Source :